Pas à pas.

Je suis une chialeuse. J'ai dit au Papa "Je vais chialer, je peux pas m'en empêcher !", pour extérioriser, pour justement ne pas chialer. Et j'ai chialé. Pas à grosses larmes. Mais la cascade de petites larmes. Ma Crapouille l'a fait. 

Le Papa l'a déposée. Il la tenait fermement, il l'a encouragée : "Allez Crevette, tu peux le faire !" et moi je me répétais "Tu peux le faire ! Tu peux le faire !". Et je tremblotais. Et elle, elle souriait. Je me demande encore si elle a compris ce qu'on lui racontait, je me demande si un élan d'assurance s'est emparé d'elle pile à ce moment là, je me demande si elle attendait que Papa et Maman soient là tous les deux pour se lancer, je me demande si elle savait qu'elle allait le faire,... Le Papa l'a lâchée. Et elle, elle se marrait. Et elle l'a fait : le premier pas. Le premier, avant le deuxième, avant le troisième, avant le quatrième... 

Je ne sais même plus si elle marchait vite ou doucement. J'ai pensé à tellement de choses en la regardant faire, et je criais bêtement : "Allez mon cœur !". Intérieurement ou ouvertement ? Je ne sais plus. C'était une espèce de ralenti accéléré. Ou d'accéléré ralenti. Accompagné de son mélange de sentiments qui va bien avec : fierté et peur, le mix qui poursuit une Maman toute sa vie durant. Au bout du quatrième pas, je l'ai vue perdre l'équilibre, se stabiliser, et finalement flêchir les genoux pour se laisser tomber sur son popotin rembourré. Elle nous regardait comme si c'était normal. Et elle a recommencé. 

Une deuxième fois. Une troisième fois. 

Hier soir... Quatre petits pas... multipliés trois fois... à pieds de pyjama... en quittant les bras de Papa... Des larmes de joie.